Le Montana, contrairement au Colorado et au Wyoming, nous avait jusqu’ici épargné les blizzards. Couverts de crème solaire nous pensions que le printemps était enfin installé. Il semble que l’hiver nord américain ait voulu nous souhaiter bonne route une dernière fois.
À notre réveil à Ennis, il tombe des flocons gros comme des balles de golf, le sol est blanc, nos vélos sont recouverts d’une épaisse couche de neige humide et collante (j’appelle cela la « neige d’Europe » contrairement à celle d’Amérique du nord généralement poudreuse). Impossible de reprendre la route dans ces conditions, nous resterons à Ennis une nuit de plus.
La tempête fait rage toute la journée. On se croirait à Montréal un jour de mars. Nous restons enfermés au chaud dans notre chambre de motel. Dans la soirée nous retournons au bar dans lequel la veille nous avions célébré le retour du soleil. Ce soir nous trinquerons pour oublier sa tragique disparition.
L’ambiance est très pittoresque. Plusieurs types avec un chapeau de cowboy vissé sur la tête, pour d’autres c’est la casquette de camionneur. Les Santiags, la chemise à carreau et le jean Wrangler complètent la panoplie. À la seconde où nous pénétrons dans les lieux, inutile de vous préciser que nous sommes repérés. On s’attend presque au classique : « Qu’est ce que je te sers étranger ?! ». Dans un endroit pareil mieux vaut ne pas commander de tisane.
Nous rencontrons Danny Calahan un nouvel arrivant dans la région. Ce descendant d’Irlandais vient du New Hampshire. Nous faisons également la connaissance de Nadia, une jeune pâtissière de Californie venue travailler dans le coin pour la saison. Nadia est de souche Irlandaise et Algérienne, un mélange peu commun !
Plusieurs cowboys payent leur tournée à tout le bar. Nous voilà avec un crédit de deux consommations chacun. La bière locale (mélange de stout de Bourbon) est certes très bonne, mais personnellement une seule suffira. Pour ne pas faire offense aux généreux donateurs, j’offre discrètement mes coupons à nos nouveaux amis.
Le jour suivant la neige a cessé. Le ciel est encore chargé et un vent glacial souffle. L’envie de rester une journée de plus nous effleure l’esprit. Nous perdrions cependant trop de temps. Nous prenons donc la décision de partir et de rouler jusqu’au village suivant à environ 50km.
Les miles s’enchaînent difficilement. Le vent et le froid nous empêchent de profiter de la beauté des paysages qui nous entourent.
Nous traversons au passage deux villes fantômes (Virginia City et Nevada City). Il s’agit d’anciennes villes de prospecteurs et de mineurs qui ont été désertées au début du XXe siècle. Les autorités locales ont restauré et entretenu les vestiges de ces communes afin d’en faire des curiosités touristiques. Certains commerces se développent même en périphérie, rendant les lieux un peu moins « fantômes ».
En cette saison et après le blizzard que nous avons eu, nous sommes seuls à nous aventurer dans le secteur. On se croirait dans un décor de film. L’architecture western et l’atmosphère sont intactes.
Le ciel se découvre peu à peu et nous reprenons du plaisir à rouler. Nous arrivons finalement à Twin Bridges. Nous y découvrons une aire de repos spécialement conçue pour les cyclistes au long cours. Il y a une bâtisse avec des fauteuils, des tables, des bancs, un évier, et juxtaposé à celle ci : une douche et des toilettes. Une belle pelouse entoure le tout et une rivière vient border ce petit coin de paradis. Tout est gratuit. Un écriteau explique que l’endroit a été financé par une association de cyclistes locale, afin d’accueillir les voyageurs. Nous qui n’avions encore rien trouvé pour passer la nuit (ni hébergement chez l’habitant, ni motel, ni Camping) ce havre pour cyclistes est une bénédiction.
Le Montana n’a décidément pas fini de nous surprendre.
Incroyable cette neige au mois de mai! Courage ….
En un mois ici on a connu toutes les saisons 😉
Hey boy, un coup de photoshop, tu ne gardais que les selles, et à la place des pédales, tu mettais des sabots. Et voilà qu’on était chez Wyatt Earp. Waouhhh, ambiance » no country for young men « , et puis cette providence du biker qui ne vous laisse jamais tout-à-fait tomber, même entre deux blizzards. Un bike camp avec sa petite rivière pour y attraper à mains nues le saumon que vous fumerez au feu de camp. Oui, il était temps de passer de la brewery des Tétons au saloon de Nevada City, yes men. Bon, je ne sais pas pourquoi, mais en te lisant, j’entends comme un vieil air d’harmonica, oui, c’est ça, un truc qui fait grincer le blizzard et hurler les coyotes. It’s such a long way to go to heaven. Don’t give up boys. Bisous.
C’est à peu près ça en effet. En air d’harmonica d’Ennio Moricone !
C’est un peu la Rose Pourpre du Caire (ou du Montana) inversée: c’est nous, les lecteurs-spectateurs, qui traversons l’écran pour aller visiter le cliché (au sens de « petite mythologie personnelle » et au sens « photographique ») pour découvrir tout un monde avec plein de gens dedans.
C’est chouette.
Haha oui, belle analogie. Bien que parfois j’aimerai que ce soit nous qui puissions traverser l’écran et venir nous réchauffer de l’autre côté… On simplement prendre un Bon café 😊
Ce n’est pas seulement un voyage. Vos vélos sont des machines à voyager dans le temps!!!! Il ne vous reste maintenant qu’à croiser une diligence et rencontrer Davi Crockett…