Au lendemain de notre soirée chez Daniel et Charlotte, nous nous préparons pour l’ascension du Teton Pass, un col reliant le Wyoming à l’état de l’Idaho plus à l’ouest.
À notre réveil quelques flocons tombent encore. Nous commençons à croire que nous sommes définitivement damnés. Heureusement la neige cesse sur les coups de 9:00. Parfait, c’est l’heure à laquelle nous espérions décoller.
La destination du jour est Victor, petite ville de l’est de l’Idaho. Seulement 40km nous en séparent, mais avec le « mur » de la chaîne des Tetons entre les 2. Encore une journée qui s’annonce épique !
Près de 10km de belle piste cyclable plus loin, nous nous trouvons au pied des montagnes. Bien que physiquement très exigeant, j’aime ce genre d’ascension . Il y a une symbolique qui me plait: 2 malheureux êtres humains partant à l’assaut de ce mur éternel qui se dresse devant nous. Une sorte de David contre Goliath en quelque sorte.
Daniel nous avait recommandé d’emprunter une petite route désaffectée et réservée aux promeneurs plutôt que la « highway » nouvellement construite et très encombrée. Nous nous rendons rapidement compte qu’en plus d’être désaffectée, cette route est quasiment en ruine et la nature y a repris ses droits.
La pente est raide, Ben et moi avançons donc péniblement, seuls au milieu de cette forêt de sapins dense. Une main sur guidon, l’autre sur la bombe de gaz répulsif pour animaux sauvages, en priant de ne pas voir surgir un ours et de devoir s’en servir.
Au lieu d’un ours, c’est d’abord une jeune fille faisant son jogging que nous croisons. Puis d’autres promeneurs, un élan, et finalement 2 femmes qui sortent leur chien.
À ce moment là nous avons déjà bien avancé et le sommet du col ne nous semble plus très haut. Les 2 promeneuses en reviennent et nous annoncent qu’à quelques dizaines de mètres de plus haut, la route devient totalement impraticable : une épaisse couche de neige et de glace recouvre la voie. À moins d’être équipé de raquettes, il est également impossible de passer à pied. Pas le choix, nous devons faire demi tour.
C’est l’âme en peine que nous rebroussons chemin. Contraints de redescendre tout en bas et remonter par la Highway. Le cœur n’y est plus. La montagne gagne par KO.
De retour au points de départ, écœurés, nous décidons de faire du stop. Très vite un véhicule s’arrête. Walter, un jeune biologiste du parc national nous emmène. Très sympathique, il nous donne quelques bonnes adresses dans la vallée de l’autre côté, dont une brasserie locale où il est possible de visiter et de déguster. Voilà de quoi remonter notre moral !
Nous demandons à Walter de nous déposer au sommet du col. Ben et moi souhaitons y faire quelques photos et surtout ensuite dévaler les 8km de descente. Après tout, nous ne les avons pas volés, si la neige n’avait pas truqué le combat, nous serions venu à bout de ce col !
En descendant, je jette régulièrement un œil au compteur et me prend au jeu : Jusqu’où peut-on monter ? Le plus élevé que j’ai pu lire: 49MPH (près de 78km/h). Petit jeu très puéril et dangereux j’en conviens, mais que voulez-vous, l’adrénaline est une substance à laquelle il est difficile de résister.
De l’autre côté du col, nous passons la frontière de l’Idaho et comme nous l’avait suggéré ce cher Walter, nous allons célébrer cela dans la petite brasserie du coin. L’ambiance y est chaleureuse. Un mélange d’odeur de pop’corn chaud et de houblon parfume l’atmosphère. Quelques habitués sont présents. Parmi eux, Eric, un cycliste VTT professionnel de la région, avec qui nous bavarderons une bonne heure, tout en appréciant l’agréable amertume de la bière locale.
Tout le monde se connaît à Victor. Notre nouvel ami Eric connaît bien le couple qui doit nous héberger ce soir là. Il nous recommande également auprès de la petite boutique de vélo du coin (Cycles Fitzgerald) où Benoît aimerait faire réviser sa monture. Nous y sommes accueilli chaleureusement par Carolyn, une employée de la boutique, qui nous sert au passage un délicieux espresso digne des meilleurs Cafés d’Europe.
Après avoir laissé le vélo de Benoit pour être examiné et remis à neuf, nous nous rendons chez nos hôtes d’un soir: Gene et Jenny, un couple de quinquagénaires originaires de Chicago, venu s’installer dans la région.
À notre arrivée chez eux, ils doivent partir pour la fameuse brasserie où ils ont rendez-vous avec des amis. Il ne nous connaissent pas depuis plus de 5min et nous laissent seuls chez eux, nous invitant à nous mettre à l’aise et faire comme si nous étions à la maison. Bien que très courant aux États-Unis dans les Warmshower, cette confiance en autrui me fascinera toujours.
Au lendemain de cette première nuit dans l’Idaho, nous partons récupérer le vélo de Benoît. Tout semble désormais impeccable. « Vous pouvez même aller sur la lune avec si vous le souhaitez » nous lance le mécanicien. La lune ?… Le Canada, ce sera déjà très bien.
Le temps de prendre un dernier espresso dans la boutique et nous voilà reparti, direction Tetonia, petite ville de la vallée où nous attend notre nouvel hôte: Nancy.
Nancy est originaire de Louisiane. Malheureusement pas de soirée en Français cette fois ci, la connaissance de la langue de Lafayette s’arrête à la génération de ses grands parents. Arff… Napoléon, tout ça c’est de ta faute !
Des amis de Nancy nous rejoignent pour une petite soirée chez elle. Tous sont originaires d’une autre région des Etats-Unis (de la côte est principalement) et ont souhaité changer de mode de vie en venant s’installer dans cette vallée, à 15 min (en voiture !) de la chaîne des Tetons.
Enfin, alors que l’on ne l’espérait plus, le beau temps revient le jour suivant. Le ciel est parfaitement bleu, la température dépasse les 10 degrés, les montagnes dégagées qui surplombent la vallée… Journée idéale pour se rendre à Ashton, petite ville sur notre route vers le Yellowstone.

C’est plutôt Sisyphe contre Goliath, non ?
J’ai l’impression que la plupart des bonnes histoires se terminent dans une brasserie.
En tout cas, d’ici, ça donne envie, ces hôtes chaleureux et ces ciels parfaits.
Toujours… Une belle journée de velo doit se finir par de la mousse et du houblon !
Et en effet c’est bien vu pour Sisyphe 😉
Au moins, avec les brasseries, vous échappez au supplice de Tantale.
Bonne route. Hâte de voir Yellowstone
😉 en effet la bière ne compte pas, seul l’eau et les fruits 😉
Une péripétie après l’autre et vous continuez la route sans hésiter. Vous avez droit à notre plus grand respect! Bonne route xxx
Merci Ghislaine. Une péripétie après l’autre, Mais également des moments de bonheur intense qui font oublier les péripéties 😉
Que de beaux paysages et que de belles rencontres. Ne lâchez pas!!!
Moi aussi, je remarque que vos aventures se terminent souvent dans les brasseries et dans les tavernes!!!
Toujours oui. Ça remet les idées en place 😉
Dieu dans un mauvais jour a créé le blizzard. Il le balance chaque fois qu’il a mal aux dents. Et là, on dirait bien qu’il y a un problème d’hygiène bucco-dentaire du côté du céleste. Mais les hommes se sont adaptés. Ils ont inventé le pickup. Providence des bikers refoulés à une encablure du sommet des Tétons, (on est ici plus dans la testostérone que dans l’adrénaline…. ), et qui doivent faire demi-tour, en maudissant le ciel. Et c’est tout le génie des hommes, en plus du pickup, ils ont inventé la bière et dispersé les brasseries dans des coins improbables où le pénitent redécouvre le goût du miracle à la première gorgée. L’écume du blizzard ne fait jamais qu’annoncer la mousse à la pression. Le vrai mystère de la route enfin révélé dans ton blog. Putain c’est balaise. La pierre de Sisyphe qui roule amasse bel et bien de la mousse. Allez, le Yellowstone n’est plus très loin. Et tu as encore d’autres belles pages à écrire pour continuer à nous faire partager ce super voyage . Bisous à vous deux et à tous vos hôtes si magnifiquement accueillants.
Ah bien vu la pierre de Sisyphe qui amasse la mousse 😉
Il fait beau sur Yellowstone !!! ( ici Old Faithful – webcam live )
https://www.nps.gov/features/yell/webcam/oldFaithfulStreaming.html
Savourez les gars ! Courage !
Ciel super dégagé en effet ! Merci Houston !
On espère justement être sa’ ce secteur demain.
Impressionnée par votre périple sympa le soir, mais tellement rude parfois !
Je vous félicite tous deux pour votre courage a affronter les éléments.. la dernière photo est très angoissante.
Merci pour votre partage, vos récits de vécus… j’aime beaucoup!
Merci pour les encouragements. Ça nous touche et nous motive d’autant plus.
Bonjour Pierre et Benoît,
Pierre, je ne sais pas si tu suis la situation de ton nouveau pays, mais en Alberta, c’est la catastrophe.. Les feux de forêt sévissent au Nord de Jasper. La ville de Fort McMurray est dévastée. 100000 habitants ont quitté la ville en flamme. Plusieurs feux sont en activité actuellement sur 100 km. La température est comparable au Sud de la France en été….
Tout cela pour vous dire que je ne sais pas à quel moment vous prévoyez être à Jasper, mais il faudra bien vous informer… Un autre défi vous attend!!!
À+
Oui, nous suivons cela de près. C’est très impressionnant ce qui se passe. Comme quoi les gaz de schiste…
Nous allons suivre l’évolution.
À très vite.